La question, cela allait de soi, ne portait pas sur l'opportunité de disputer le sempiternel match dominical contre l'équipe locale de Détrie, un patelin situé à quelques encablures de la ville; elle soulevait encore une fois l'épineux problème du transport : par quel moyen allait-on pouvoir s'y rendre ? C'était le sujet du débat qui réunissait sur la "placette", en cette fin d'après-midi de printemps, le petit groupe d'adolescents désoeuvrés, la plupart encore sous l'effet d'une sieste réparatrice de laquelle ils avaient du mal à émerger. Ceux qui avaient suggéré imprudemment d'y aller tout naturellement a pied, avaient dû endiguer un flot de contestations outrées.
-Détrie, mais c'est pas la porte à côté ! s'étaient insurgés les plus cossards, les "gandoules" qui formaient, il faut en convenir, le plus gros de la troupe.
- C'est pas non plus la mer à boire, avaient rétorqué du tac au tac les plus vaillants.- C'est peut-être pas la mer à boire mais c'est quand même des kilomètres à avaler, avait conclu Michel qui ramenait toujours tout au niveau du tube digestif. Michel, seul garçon d'une famille nombreuse, entouré de toute une ribambelle de soeurs dévouées ou asservies, avait une sainte horreur de l'effort physique.